…Mais d’où vient la rosée?
Rosée comme phénomène physique
« La rosée est formée d’eau. Elle se forme la nuit, quand le ciel est dégagé ».
Tout est résumé dans ces quelques mots.
La rosée, c’est le résultat d’une transformation quasi magique de la vapeur d’eau contenue dans l’atmosphère, se métamorphosant sur un support froid en gouttelettes d’eau liquide.
Le support peut-être plus froid que l’atmosphère ambiante parce qu’il cède sa chaleur à l’espace interstellaire en diffusant sa lumière, des ondes infrarouges.
L’agitation thermique désordonnée des molécules de vapeur dans l’air se transforme en ordre liquide grâce à la température plus basse et à la structure organisée du support : c’est le phénomène de condensation.
Cette température, où la vapeur d’eau est sursaturée et se transforme en eau liquide est précisément appelée » température de rosée « .
Les gouttes de pluie et de brouillard naissent, elles aussi, sur des supports, mais des supports microscopiques : poussières, grains de sable du désert, embruns marins… qui sont autant de germes favorisant la condensation. On peut dire que pluie et brumes sont la rosée du ciel.
L’importance des échanges radiatifs dans la température des surfaces où la rosée se forme a été suspecté très tôt dans la formation de la rosée ; l’hypothèse est sous-jacente dans le premier livre sur ce sujet, par William Charles Wells » An essay on dew, and several appearances connected with it « , publié en 1814 à Londres.
Les échanges radiatifs ont, pour simplifier, deux actions antagonistes : chauffage, par le rayonnement solaire, et refroidissement, principalement par émission infrarouge, le rayonnement qu’émet un matériau à température ambiante. Le jour, le chauffage direct ou indirect du soleil l’emporte sur le refroidissement. La nuit, sans chauffage solaire, le substrat se refroidit. Bien évidemment, les gaz à effet de serre présents dans l’atmosphère comme le gaz carbonique et surtout la vapeur d’eau limitent le refroidissement infrarouge. Le refroidissement peut même s’annuler quand la couverture nuageuse est dense : c’est pour cela que la rosée se forme pendant les nuits claires.
Si la rosée est appréciée pour la fraîcheur qu’elle apporte les petits matins d’été et pour l’humidité qu’elle procure aux plantes, même en périodes sèches, la gelée blanche ou givre est moins aimée quand elle apparaît, généralement dès octobre, et qu’elle nous oblige à gratter les pare-brises avant de se rendre au travail.
S’il y a givre, c’est parce que la température de la surface descend en dessous de zéro degré et que les gouttelettes de rosée ont gelées. Ces gouttelettes gelées continuent de grossir sous forme d’aiguilles de glace qui forment le givre, véritable » cristal » de rosée.
Rosée et givre se produisent pourtant de la même manière et exigent les mêmes conditions: un ciel nocturne dégagé, un fort rayonnement d’où une baisse des températures, un vent calme et une forte humidité.
La croissance des gouttelettes de rosée s’effectue selon des règles simples, qui conduisent à un ordre étonnant. Quand de petites gouttelettes naissent sur une surface, elles sont de très petite taille, de l’ordre de quelques millionième de millimètre. Elles grossissent en agglomérant les molécules de vapeur autour d’elle : ce sont de véritables pompes à molécules. En augmentant leur taille, elles vont se toucher et fusionner – c’est le phénomène de coalescence – et former une nouvelle goutte, plus grosse et de même forme, mais occupant moins de place que les deux gouttes précédentes.
Le résultat est surprenant, mais il est simplement dû au fait que les gouttes » poussent » dans une dimension différente de la surface, la troisième dimension. Quelles que soient les tailles des gouttelettes, de l’ordre de quelques longueurs atomiques, comme on les détecte durant la fabrication de couches minces pour la nano-électronique, ou des millions de fois plus grosses, comme celles que nous observons à l’œil nu sur les feuilles du jardin ou les vitres embuées de nos cuisines, la surface restera sèche en permanence sue presque sa moitié. Il en résulte des propriétés » universelles » de la rosée, que nous ne détaillerons pas ici, mais qui rend ce modèle très populaire parmi les scientifiques qui étudient les propriétés statistiques de la matière.
Et on sait même faire » sauter les gouttes de rosée ! Si la température du solide sur lequel se dépose la rosée est proche de son point de fusion, la chaleur (latente) que le solide doit évacuer pour que les molécules désordonnées de vapeur se » calment » et s’ordonnent en liquide, est suffisante pour liquéfier le substrat. La goutte se met alors véritablement à » sauter « une danse de Saint-Gui.
Les gouttes de rosée peuvent même » parler » entre elles : quand elles se touchent et fusionnent, elles émettent un petit » cri » qui peut être rendu audible.